Entretien avec Guillaume Colin, para wingfoiler

24/05/2024

Propos recueillis par Mathieu Claude-Sanchez

 

Bienvenue au Défi Wing 2024 avec près de 400 participants cette année et du très bon niveau! Inscrit moi-même sur cette nouvelle édition du Défi, c’est alors que je croise lors de la première manche un wingfoiler pas tout à fait comme les autres, et pourtant il vole mais assis sur sa planche… Je me dis « lui, il a un gros mental ! » Effectivement, naviguer avec tant de monde sur l’eau autour de soi, dans du vent assez soutenu, en compétition, il faut oser et avoir une certaine force de caractère, car le Défi, ce sont des courses de plus de 20 km, c’est à la fois une épreuve physique et mentale. Bien que Guillaume ait la passion en lui, sa ténacité force l’admiration et inspire la persévérance. Laissons-le nous raconter son expérience…

 


Salut Guillaume, peux-tu te présenter et nous dire quel est ton home spot pour le wingfoil ?
Je m’appelle Guillaume Colin, j’ai 40 ans et je suis responsable d’un bureau d’études dans la construction bois à Montpellier. Je navigue essentiellement à Port-Camargue, la Grande-Motte et le Grau-du-Roi. En wing, je ne navigue pas encore dans les vagues qui déferlent mais je commence à surfer la houle, en mode freefly.

 

Et pourquoi se mettre au wingfoil plutôt qu’un autre sport ?
Cela fait longtemps que je suis passionné par le milieu de la glisse, du vent et des vagues, je fais de la voile, du windsurf et du surf depuis mon enfance, puis je me suis mis au kite en 2014. Mais je n’ai pas pu continuer l’année suivante, car j’ai eu un accident qui m’a paralysé les jambes, ce n’était pas en kitesurf. Et comme j’aime la mer et que j’ai une certaine aisance dans l’eau, je n’allais pas m’arrêter là. C’est pourquoi j’ai continué à surfer après mon accident, le wingfoil n’existait pas encore. J’ai bien fait puisque j’ai atteint le Graal, nous sommes devenus, avec l’ensemble de l’équipe de France, champions du monde de para surf en 2023. Personnellement, je suis dans la catégorie SIT SURF (waveski), et chaque membre de la team concourt dans sa catégorie. C’est bel et bien une victoire collective. Quant au wingfoil, j’ai seulement commencé durant l’été 2023, il n’y a pas un an. Dès lors où j’ai pris une aile dans les mains, sur la plage, j’ai tout de suite eu envie de pratiquer la wing simplement par le fait de ressentir cette traction dans les bras, ça m’a fait penser à la planche à voile, mon cerveau s’est tout de suite connecté 20 ans en arrière, j’ai adoré. Et comme je suis quelqu’un qui a toujours soif de nouvelles aventures et de challenges, je n’ai pas eu d’appréhension, ce fut comme une évidence de me mettre au wingfoil.

 

Comment t’es venu l’idée d’adapter ta planche de wing à ton handicap ?
Avec mon expérience dans le surf, ça n’a pas été trop difficile de fabriquer un siège en mousse rigide pour me rehausser sur ma planche de wing, c’est du bricolage efficace réalisé par mes soins. Et avec l’aide d’un shaper, on a mis au point et inséré des footstraps pour que je puisse caler mes pieds afin qu’ils ne bougent plus et de faire complètement corps avec la planche, surtout à l’aide de la ceinture ventrale que je porte autour de moi. D’autre part, mes acquis dans le surf assis m’ont permis de retranscrire la position que j’ai dorénavant sur ma board de wingfoil, justement par l’intermédiaire des straps et de la ceinture.

 

400 participants au Défi Wing sur une manche de 20 km, ça fait beaucoup de monde sur l’eau ! Comment s’est passée pour toi le départ, les courses et combien de manches as-tu fait ?
J’ai préféré partir en retrait pour être à l’aise en naviguant comme je sais faire, sans me prendre la tête. C’était génial de croiser les autres riders, certains surpris de me voir, d’autres avec un grand sourire m’encourageant. L’ambiance était super sympa sur l’eau, je me suis régalé ! Je n’ai pas fait le marathon de 40 km, par contre j’ai couru 4 manches sur 7 d’environ 20-22 km chacune.

 


Mais au fait, quelle est la logistique pour te mettre à l’eau ?
J’ai uniquement besoin d’une assistance pour porter l’ensemble de mon matériel de ma voiture jusqu’à la mise à l’eau à environ un mètre de profondeur. J’installe ensuite mon siège sur la board et en-avant ! Je me déplace souvent seul sur les spots comme pour le Défi, j’ai ma voiture. Le plus important, c'est qu’il y ait quelqu’un sur le spot en combinaison sur la plage ou au bord de l’eau pour m’aider, heureusement, je ne suis que très rarement frustré, c’est très rare de me retrouver seul. Ces non-sessions frustrantes arrivent en général l’hiver puisqu’il y a moins de monde à l’eau.

 

Le vent a été fort durant le Défi Wing, surtout le dernier jour où ça naviguait dans des claques à 40 nœuds… Cela ne t’a pas gêné ?
J’avoue que ce n’était pas facile, faire 10 km à la force des bras dans du vent fort fut un gros challenge et je n’étais absolument plus dans ma zone de confort. Je navigue sans harnais, car aucun n’est encore adapté à mon handicap, donc mes bras et mes épaules sont très sollicités. Et avec un harnais standard, ça peut devenir plus compliqué pour moi de me décrocher en cas de chute. Il me faut du vent pour décoller puisque je ne peux pas pomper avec les jambes, je navigue parfois dans 15 nœuds mais ce n’est pas ce que j’aime le plus. Souvent, je fais du wing légèrement surtoilé, c’est plus simple.

 

Parlons matos, tu navigues avec quelle planche et quel foil ? Tu es sponsorisé peut-être ?
Oui Gong est mon partenaire, je fais partie de leur team rider. Je navigue principalement avec une front wing de 1300 cm². Je sors occasionnellement la 1850 ou la 1200, mais moins souvent. J’ai besoin de surface assez grande puisque je ne me sers pas de mes jambes au take off. Et pour les planches, je me sers surtout de la 105 litres dans la plupart des conditions météo. C’est celle que j’avais au Défi.

 

Ce fut un magnifique Défi Wing, une organisation béton et une ambiance de feu. Et toi, quelle est la plus belle image de la plus grande compétition de wingfoil au monde ?
À terre comme sur l’eau, l’ambiance était top, pleins de sourires, beaucoup d’encouragements me concernant. J’ai eu un trophée d’honneur, je ne m’y attendais pas ! Et de revoir les images du Défi lors des départs pleine balle grâce à ces magiciens qui filment avec l’aide de leur drone, ça me laisse un souvenir incroyable !

 


D’ailleurs, comment t’es-tu préparé pour faire le Défi Wing ?
Le surf m’aide beaucoup, mais je nage régulièrement et je fais un peu de préparation physique, notamment de l’entretien musculaire et du gainage. C’est vrai que le haut de mon corps est hyper sollicité, c’est donc important de faire d’autres sports en plus du wingfoil.

 

Et quel est ton souhait pour le Défi Wing 2025 ?
Trois choses me viennent à l’esprit : avoir peut-être un harnais adapté à ma pratique en wing, faire le marathon de 40 km sur l’eau, et aussi qu’il y ait davantage de personnes qui sont aujourd’hui en situation de handicap physique pour le plaisir de naviguer ensemble, pas pour la gagne. Le Défi Wing est, pour moi, avant tout le rendez-vous annuel de tous les passionnés.

 

À travers le surf que tu pratiques à haut niveau et le wingfoil depuis un an, quel message peux-tu transmettre aux autres personnes en situation de handicap physique et qui n’osent pas passer le cap pour aller sur l’eau ?
S’il y a l’envie, il y a une solution ! Et certes ça prend du temps de trouver une adaptation entre la personne et son matériel de wing ou de surf, il faut se donner les moyens et avoir un état d’esprit positif. On arrive toujours à s’amuser avec les capacités qu’on a et qu’on développe petit à petit ! Il faut être clairvoyant et accepter de naviguer sur un spot adapté à notre physique et notre pratique, que ce soit en surf ou en wing.

 

Comme vous l’aurez compris, Guillaume, para wingfoiler et para surfer, garçon touchant, dont l’histoire mérite d’être partagée, vous donne rendez-vous sur le Défi Wing 2025 pour, avant toute chose, passer un moment convivial entre amoureux de la glisse et du vent. Et croyez-nous, l’expérience est unique… On a hâte !

 

Pour suivre Guillaume, toujours disponible, rendez-vous sur www.instagram.com/gcolin_surf

 

Source : Guillaume Colin
Photos : Défi Wing/Jean-Marc Cornu - Guillaume Colin - Gong Galaxy

tags: Guillaume Colin Défi Wing

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